Moscou / Saint-Pétersbourg
J’ai préféré Saint-Pétersbourg à Moscou. Pourtant, en revisionnant mes images, celles de Moscou sont plus attrayantes, comme si j’étais entré plus profondément dans la ville qu’à Saint-Pétersbourg.
Saint-Pétersbourg est une ville traditionnellement européenne et Moscou une ville russe. Aujourd’hui, j’ai la sensation qu’on trouve plus de Russie à Saint-Pétersbourg qu’à Moscou. Les rôles anciens/modernes se sont inversés. Saint-Pétersbourg, l’avant-gardiste, est demeurée une ville européenne, de la vielle Europe tandis que Moscou, la conservatrice, est désormais une ville américaine. Mais si l’on peut vivre aux USA et rester ce que l’on est, alors finalement, peut-être que Moscou est plus russe que Saint-Pétersbourg…
Photographier dans les rues de Saint-Pétersbourg est plus simple qu’à Moscou. À Saint-Pétersbourg, l’indifférence au photographe révèle la gêne face à de la présence de l’appareil, on ressent comme une sourde réprobation qui ne se manifestera pas. Il est difficile, d’avoir une connivence avec les passants, de communiquer facialement (un sourire, un haussement de sourcil, une moue…) comme si tout le monde se méfiait des autres. On peut donc à loisir braquer son objectif sur les passants sans être dérangé.
À Moscou, les attitudes sont tout autres. On est dans une grande ville internationale, les comportements, comme les publicités, les enseignes… tendent à s’uniformiser. On retrouve les codes parisiens ou new-yorkais. Fixer quelqu’un de son objectif est prendre le risque de devoir argumenter.
Du coup, autant le 35 mm était l’objectif idéal pour Saint-Pétersbourg, le 50 mm me semble plus approprié pour Moscou. Il permet d’avoir une plus grande distance avec les passants, de moins les importuner, tout en permettant d’être proche. La ville est si grande que ça ne me semble pas trop être un handicap pour l’architecture. Toutes les images de ces reportages ont pourtant été réalisées au 35 mm et ce n’est finalement pas si mal.
De toute manière la question de la distance est aussi une affaire d’appréhension personnelle de la situation. Plus on est à l’aise et plus on s’approche.
La barrière de la langue a aussi beaucoup fait pour provoquer un repli sur moi-même. J’ai plus cherché à me trouver qu’à rencontrer des Russes. D’ailleurs, les seules personnes avec lesquelles j’ai véritablement échangé ont été des Français, un Suisse et une Pétersbourgeoise amoureuse de Paris à l’accent et au vocabulaire français irréprochables.